Brasser le varech. Brasser les émotions. Remuer les souvenirs. Se réapproprier le langage du père décédé pour reconnecter avec lui. Dans ce livre, Noémie se place en observatrice pour exprimer comment elle a vécu et comment elle vit maintenant la relation avec son père.
Noémie Pomerleau-Cloutier est formatrice dans un organisme d’alphabétisation populaire. Une de ses particularités : elle initie les participants à la poésie. J’ai eu la chance de voir Stéphane, un des participants, lire des poèmes et se décrire comme poète (avec raison) lors d’un événement organisé par le Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec (RGPAQ) au Monastère des Augustines.
La fierté qu’il dégageait!
Ça m’a donné envie de verser une partie des revenus du blogue que vous lisez en ce moment à un des projets dans lesquels Noémie s’implique. J’ai donc effectué un don de 150$ en juin 2017 à L’Atelier des lettres. Cliquez ici pour en savoir plus sur les dons effectués à des initiatives en alphabétisation.
Maintenant, passons au livre Brasser le varech!
« Tu m’avais appris le langage sylvestre. Les arbres et les plantes ont ces silences forts qui ne sont pas donnés aux humains. C’est la langue avec laquelle tu étais le plus à l’aise. Au camp de vacances, j’adorais la botanique. Elle me fournissait ton code. Quand tu es parti par le bois, je l’ai enfouie bien loin. Cette année, longtemps après le déracinement, ma mère m’a offert un merveilleux cadeau : ton exemplaire vintage de la Flore laurentienne avec ton écriture de boisé dedans. Elle a déterré la clé. Je peux ouvrir la voûte. Je réapprends à parler la langue paternelle. »
Moi qui ne connais pas grand-chose en botanique, vais-je comprendre ce que je vais lire? Déjà que la poésie ce n’est pas toujours facile d’approche.
Je vous rassure : nul besoin de bien s’y connaître en botanique pour comprendre les mots de Noémie. Les émotions et les intentions sont suffisamment claires pour nous toucher.
« vers la fin
on avait avancé
la classification
de son espèce végétale
il était trop tard
l’émondeuse avait commencé
son travail »
« nuit vert jaquette
ton bouleau de père
répandu sur le lit
l’écorce méconnaissable
il flotte dans l’air
une odeur de thé des bois »
« tu ravales
le goût résineux
qui remonte
même dans les havres
où tu te blottis
quand tu voudrais en parler
tu fais comme si de rien n’était
tu tais les mutilations des marées »
« c’est encore l’été
mais tu perds tes aiguilles
à chaque kilomètre »
Avouez qu’il n’est pas nécessaire de connaître la botanique pour être touché! Dites-vous que c’est comme ça pendant environ 100 pages.
Vers la fin, on voit les rayons de soleil percer les nuages :
« petit à petit
des lamelles
qui jonchent
le banc de scie
de ton père
tu construis
ton quai »
Les textes sont classés en 5 thèmes, que je vois comme 5 étapes du processus de deuil :
- Souches
- Pousses
- Coupe à blanc
- Drave
- Reboisement
À lire pour apprivoiser le deuil. À lire pour découvrir la flore laurentienne. À lire pour lire de la beauté.
Brasser le varech
Noémie Pomerleau-Cloutier
La Peuplade
ISBN : 9-782924-519592
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