On pense qu’on a toujours le temps, jusqu’à ce qu’on réalise qu’on n’a plus le temps, justement. Dans ce roman, Delphine de Vigan nous transporte dans la vie d’une femme en fin de vie qui a envie d’exprimer sa gratitude avant qu’il ne soit trop tard.
Ça commence fort! Voyez par vous-même.
« Vous êtes-vous déjà demandé combien de fois par jour vous disiez merci? Merci pour le sel, pour la porte, pour le renseignement.
Merci pour la monnaie, pour la baguette, pour le paquet de cigarettes.
Des merci de politesse, de convenance sociale, automatiques, mécaniques. Presque vides.
Parfois omis.
Parfois exagérément soulignés : Merci à toi. Merci pour tout. Merci infiniment.
Grand merci.
Des merci de profession : Merci pour votre réponse, votre attention, votre collaboration.Vous êtes-vous déjà demandé combien de fois dans votre vie vous aviez réellement dit merci? Un vrai merci. L’expression de votre gratitude, de votre reconnaissance, de votre dette. »
extrait tiré du roman Les gratitudes de Delphine de Vigan, publié chez JC Lattès.
Avec ce premier chapitre, Delphine de Vigan nous amène déjà à réfléchir. Et elle le fera jusqu’aux dernières pages.
Michèle Seld, dite Michka, perd son autonomie. Elle est en fin de vie. Elle vit dans un EHPAD, le pendant français du CHSLD. En plus d’avoir à vivre plusieurs deuils liés au quotidien, elle souffre d’un début d’aphasie. Ironie : Michka a travaillé dans les mots pendant plusieurs années.
La structure du roman est basée sur une alternance des points de vue de Marie et de Jérôme. Marie est une jeune femme que Michka a aidé dès son enfance. Jérôme est l’orthophoniste qui aide Michka à ne pas perdre les mots trop rapidement. Chacun d’eux donnent beaucoup à Michka, et elle leur donne beaucoup aussi.
Michka aimerait partir en paix, mais elle a des remerciements à faire. Elle tente, pour une 2e fois, de retrouver le couple qui l’a sauvé pendant la Deuxième Guerre mondiale. Marie, pour l’aider (et tenter de lui redonner ce qu’elle a reçu de Michka au fil des années), publie de nouveau une annonce dans le journal Le Monde.
Les dialogues de Delphine de Vigan représentent avec justesse la perte des mots. Souvent, je me suis sentie mal à l’aise, peut-être parce que je crains que ça m’arrive un jour. C’est pas facile de se montrer vulnérable.
Parfois, les lapsus sont drôles ou très révélateurs. Et toujours, il y a du respect. Et de l’amour. N’ayons pas peur des mots!
Cette lecture tombe à point dans ma vie puisque je me dirige vers Les Correspondances d’Eastman, un événement qui met de l’avant les échanges épistolaires. Et quoi de mieux qu’une lettre pour exprimer sa gratitude à des gens à qui il n’est plus possible de s’adresser?
D’ailleurs, un bloc de correspondance, des crayons et une gomme à effacer ont un rôle important à jouer dans le roman!
Et vous, vous êtes-vous déjà demandé combien de fois dans votre vie vous aviez réellement dit merci? Avez-vous des gratitudes à exprimer? Avez-vous des regrets? Si vous en avez envie, je vous invite à nous partager vos expériences. Et dans tous les cas, je vous invite à lire Les gratitudes de Delphine de Vigan.
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Libraire, chroniqueuse culturelle et animatrice, ma vie tourne pas mal autour des livres!
(Ma vie tourne aussi pas mal autour de la radio. La preuve : je suis diplômée en animation radiophonique et je veux en vivre.)
Je lis de tout, et partout. Sur papier et sur ma liseuse numérique.
Je parle de mes lectures simplement, comme j'en parle avec mes amis devant un verre ou une tasse. Sentez-vous bien à l'aise de vous préparer un breuvage. 😉
N’hésitez pas à commenter et/ou à me recommander des lectures.
Un livre que j’ai beaucoup aimé aussi. Après les Loyautés, les Gratitudes, Delphine de Vigan a dit que ce serait une trilogie. Hâte !