C’est officiel : je ne donnerai pas ma copie de ce livre lors de l’événement Le 14 février, je donne un livre! Je veux m’y référer au besoin et la mettre entre bonnes mains de temps à autre. Et pour le moment, je veux vous en partager des extraits afin de vous montrer à quel point ce livre est essentiel.
« Le jugement fait mal et pousse la personne malade à avoir honte d’une maladie qu’elle n’a pas choisie. Il retarde trop souvent le moment d’une prise en charge et pousse à un plus grand isolement. La maladie mentale est potentiellement mortelle. Tout comme le cancer. C’est pour cette raison que j’ai voulu écrire ce livre. Pour essayer, à ma façon, de changer la vision qu’ont les gens de cette maladie invisible. »
Vanessa Beaulieu
Vanessa Beaulieu a vécu quelques tempêtes intérieures. Lorsqu’elle en a parlé dans son milieu de travail (elle est assistante-réalisatrice au cinéma et à la télévision), elle a commencé à recevoir des témoignages. Parce que oui, la maladie mentale peut toucher tout le monde. Puis elle a écrit ce livre qui fait du bien.
Même les couleurs utilisées dans ce livre sont une source de réconfort. Elles sont à la fois douces et énergisantes.
Chaque témoignage débute par une photo et une courte bio. Ensuite, il y a une série de questions et de réponses pour représenter les échanges entre les gens qui se racontent et l’intervieweuse, avec quelques photos ça et là. Pour conclure, il y a des conseils et des grandes leçons à retenir, avec une dernière photo.
J’ai remarqué qu’il arrive que les gens sourient plus lors de la dernière photo. Est-ce un hasard?
Parlant de photos, Same Ravenelle, celle qui est l’artiste derrière la majorité des photos, se confie sur le trouble obsessionnel compulsif et l’anxiété.
Et puisque ça peut être difficile de bien comprendre, il y a des textes pour expliquer les maladies mentales et certaines réalités qui peuvent créer de la détresse.
Les témoignages
Le sous-titre de Mes tempêtes intérieures dit vrai : ces témoignages sur la santé mentale sont porteurs d’espoir.
Ils sont regroupés par « phénomène météorologique ».
Les orages
- Saskia Thuot : Apprendre à s’aimer comme on est
- Jean-Nicolas Verreault : Les défis de la vie de famille
- Gabrielle Marion : Devenir une femme
- Marianne St-Gelais : Se relever d’un échec (pour d’autres témoignages sur les échecs, je vous suggère de lire mon texte sur Le pouvoir de l’échec d’Arnaud Granata)
Les ouragans
- Kevin Bazinet : L’anxiété et l’isolement
- Same Ravenelle : Le trouble obsessionnel compulsif et l’anxiété
- P-A Méthot : Le trouble bipolaire
- Andee Leclerc : La psychose
- Florence K : La dépression quand on est une maman monoparentale (j’ai parlé de son livre Buena Vida, où elle parle de ses tempêtes intérieures, ici)
- Véronique Bannon : L’abandon, la recherche de soi et le mal de vivre
- Larry Beattie et Linda : Le choc post-traumatique
- Carolane Stratis : L’importance de la médication dans le traitement de la dépression
S’éloigner de l’œil du cyclone
- Eliane Gagnon : S’affranchir de la dépendance
- Véronique : La superwoman qui voulait mourir
- Jean-Marie Lapointe : Vaincre les troubles alimentaires
- François Imbeau-Dulac : Contrôler son alimentation
- Ingrid Falaise : Après la violence conjugale
Après la tempête
- Leah Parsons : Le suicide de son enfant
- Claudia Larochelle : La perte d’un être cher
- Biz : La dépression post-partum au masculin
- Patrice Godin : Le sport comme exutoire
- Karine Champagne : Changer de vie après la maladie
- Manon Massé : Se servir de sa différence pour aider les autres
Voici quelques extraits pour vous montrer un peu la variété des témoignages :
« Je crois que j’ai essayé d’entrer dans un moule. D’ailleurs, les gens que j’ai rencontrés qui avaient un trouble de santé mentale étaient en général des personnes qui voulaient entrer dans le moule pour être comme tout le monde. C’est pour ça que parfois on tombe malade. »
Saskia Thuot : Apprendre à s’aimer comme on est
« C’est pour ça qu’après le congé des fêtes, j’ai accepté de prendre un léger dosage d’un anxiolytique pour voir l’effet que ça aurait sur mon anxiété. Je ne voulais plus ressentir ce mal qui m’habitait. Je ne voulais plus vivre ainsi. Accepter d’en prendre, ça a tout changé. C’est fou à quel point la médication a changé ma vie. »
Kevin Bazinet : L’anxiété et l’isolement
« J’avais souvent envie de dormir parce que je savais que je ne ferais pas de crise en dormant. Prendre un bain chaud m’aidait aussi à contrôler mon anxiété. Je pouvais prendre jusqu’à 10 bains par jour! »
Same Ravenelle : Le trouble obsessionnel compulsif et l’anxiété
« Je n’ai plus honte de ma maladie. Ce que je trouve problématique, c’est qu’il y a encore des gens qui associent maladie mentale avec faiblesse. Nous ne devrions pas différencier la santé mentale de la santé physique. Ça devrait être juste un problème de santé, point. Parce que nous sommes un tout. Le cerveau est un organe qui peut avoir un problème, tout comme le foie. »
Florence K : La dépression quand on est une maman monoparentale
« En me guidant vers un centre de thérapie fermée où j’ai passé 30 jours, elle a changé le cours de mon destin, elle m’a sauvé la vie. Tous les jours, j’avais des thérapies de groupes ou individuelles pour comprendre d’où venaient mes problèmes de consommation. J’ai appris à m’aimer et à découvrir qui je suis. On m’a donné des outils pour cesser d’utiliser des béquilles comme l’alcool et la drogue pour fuir mes pensées et mes problèmes. »
Eliane Gagnon : S’affranchir de la dépendance
« Effectivement, lorsque je trouvais que les choses allaient moins bien à l’entraînement, ne pas manger me donnait le sentiment que j’étais capable de finalement gérer quelque chose dans ma vie. Je me sentais mieux parce que j’avais un pouvoir sur mon poids, sur mon apparence. Je sais que ce n’est pas normal. »
François Imbeau-Dulac : Contrôler son alimentation
« La journée où elle s’est suicidée, je lui ai écrit et elle m’a répondu une heure avant de passer à l’acte. Aucun appel de détresse. C’est même moi qui étais en détresse. J’étais en rupture amoureuse. J’avais mal. Je lui écrivais que je n’allais pas. Que j’étais triste! Que j’aimerais que nous allions manger ensemble cette semaine. Ce que je trouve bizarre dans tout cela, c’est qu’elle m’a répondu qu’elle allait m’appeler pour planifier un repas cette semaine. »
Claudia Larochelle : La perte d’un être cher
« Je me sentais aussi coupable de ne pas avoir été présent mentalement durant les premiers mois de la vie de mon bébé, alors que moi, j’ai eu le meilleur papa du monde. Ça me renvoyait à mon incompétence complète de père qui était toujours couché, avec l’envie de ne rien faire. Ça me mettait de la pression pour être un bon parent, alors que je n’étais même pas capable de m’occuper de moi comme il faut. »
Biz : La dépression post-partum au masculin
« Au moment où le pharmacien m’a indiqué qu’il faudrait de six à huit semaines avant que le médicament fasse effet, je me suis demandé comment je me rendrais jusque-là. Finalement, ça a pris encore plus de temps, des mois lors desquels j’étais une astronaute qui flottait dans l’espace, détachée de la station spatiale. Dans le néant total. »
Karine Champagne : Changer de vie après la maladie
« Je suis à l’opposé des standards de beauté. Ça ne change rien à mes idées. Alors pour moi, qu’on veuille me discréditer sur mon apparence, mon habillement, ma façon de parler, ça ne me dérange plus. J’ai toujours dit que je préfère être une femme vraie qu’une vraie femme selon les normes de l’industrie. Je suis moi-même et j’en suis fière. »
Manon Massé : Se servir de sa différence pour aider les autres
J’ai été troublée par ce passage :
« J’ai avalé tous les médicaments que j’avais en ma possession. Au lieu de mourir dans mon sommeil, je me suis réveillée. J’ai paniqué et composé le 911. Comme j’étais consciente à l’arrivée des policiers, ils ne pouvaient pas défoncer ma porte, qui était verrouillée; c’est le protocole. Très faible, je n’étais pas du tout en mesure d’aller leur ouvrir! Ils ont donc appelé mon ex puisqu’il possédait encore la clé de l’appartement. Comme il n’y avait pas d’ambulance disponible, j’ai dû me rendre à l’urgence en auto-patrouille. Disons que la police a eu le bon réflexe de me conduire à l’hôpital sans attendre : quand une personne vient de tenter de se suicider avec des médicaments, les minutes comptent pour être en mesure de la sauver. »
Véronique : La superwoman qui voulait mourir
Sérieux, il n’y avait pas d’autres solutions que de téléphoner son ex? Je ne suis pas rassurée par ce protocole.
De plus, le journaliste Patrick Lagacé prend la parole pour dénoncer le manque de ressources et Sonia Lupien, directrice du Centre d’études sur le stress humain et professeure titulaire au Département de psychiatrie de l’Université de Montréal, nous informe sur le stress.
« La santé mentale est un enjeu absolument sous-représenté et mal représenté. Plus nous serons nombreux à en parler, mieux ce sera. »
Patrick Lagacé : L’importance de la parole
« Il faut prendre du temps pour soi tous les jours, malgré ses horaires surchargés. C’est bon pour le corps et pour l’esprit. Il faut aller en thérapie si le problème devient trop grand. Il faut aussi penser aux stresseurs, pour mieux les affronter. Si nous en connaissons la cause, c’est plus facile de régler un problème. »
Sonia Lupien : Le stress
À la toute fin du livre, une liste de ressources est mise à notre disposition.
J’aime beaucoup que ce livre soit réaliste. Oui, après la pluie, il y a le beau temps. Mais le mauvais temps peut revenir et c’est permis. Il faut se préparer et souhaiter que le beau temps reviendra éventuellement. Et en parler.
Une de mes tempêtes intérieures
Pour moi aussi, le ciel s’est assombrit quelques fois. J’ai envie de vous raconter une de mes tempêtes en particulier parce que j’y ai pensé pendant la lecture de ce livre (mais je ne réussi plus à trouver où dans le livre, détail!).
Au début du siècle, j’ai hébergé temporairement une amie chez moi. Elle avait un conjoint violent et je pensais naïvement qu’elle serait protégée si elle était chez moi.
Mon amie étant sous son emprise, elle n’était pas capable de couper les ponts totalement.
Un jour, je l’ai vu discuter devant la porte d’entrée avec lui. J’ai dit à mon amie de rentrer dans l’appart. Ce qu’elle a fait. Sauf que, je n’avais pas barré la porte.
Je n’avais pas le réflexe de barrer ma porte.
Ce qui devait arriver arriva : il est entré chez moi.
Je garde peu de souvenirs de cet événement.
Je sais qu’il m’a frappé. Je sais qu’il a arraché deux téléphones pendant que j’essayais d’appeler les secours. Je sais que le concierge (qui habitait juste en bas) a téléphoné la police. Je sais qu’il a été rapidement arrêté. Je sais que j’ai porté plainte. Je sais que je l’ai frappé aussi et que je ne l’ai pas manqué (les policiers me l’ont dit et j’en garde aucun souvenir).
Je sais aussi que je l’ai traîné en cour (ok, pour être plus exacte, la Couronne le traînait en cour et j’étais mon témoin, mais bon) pendant 2 ans. Je voulais qu’il y ait une note à son dossier, pour ne pas que la prochaine fille qui porte plainte se fasse dire qu’il n’a pas d’antécédents.
Chaque fois que j’allais au palais de justice, il était accompagné de mon (ancienne) amie. C’est fort comme ça la manipulation.
De mon côté, plus de 15 ans et quelques déménagements plus tard, je vérifie si ma porte est barrée plusieurs fois par jour. C’est totalement irrationnel, mais je dois le faire. Je vérifie aussi si mes clés sont à l’intérieur de mon appartement (j’ai peur qu’elles soient dans la serrure et que quelqu’un entre). Je vérifie à toutes heures du jour et de la nuit.
Et vous savez quoi? La porte est toujours barrée et mes clés sont toujours à l’intérieur!
Ça m’a déjà apporté quelques discussions très sérieuses et quelques manques de respect. Genre, des gens qui intentionnellement ne barrent pas la porte pour me faire paniquer. Des gens que je n’ai plus dans ma vie, bien sûr.
On ne sait pas toujours ce qui se cache derrière les comportements des autres (et même derrière nos propres comportements). Ça ne sert à rien de juger et/ou de se moquer méchamment.
C’est tannant, mais ça ne me rend pas malheureuse. Je suis consciente que je m’en sors bien malgré tout.
J’ai eu beaucoup de difficultés à ne pas juger le comportement de mon ancienne amie. Ça n’avait aucun sens qu’elle soit encore avec lui et qu’elle ne soit pas à mes côtés. Avec le temps, j’en ai appris davantage sur la violence conjugale et sur la manipulation. Ça m’aide à être plus empathique, même si une partie de moi à envie de raisonner la victime.
* Ce livre m’a été offert par Guy Saint-Jean Éditeur. Ce texte a été écrit de façon authentique et indépendante, comme d’habitude! Cliquez ici pour consulter ma politique éditoriale.
Mes tempêtes intérieures
Vanessa Beaulieu
Guy Saint-Jean Éditeur
ISBN : 978-2-89758-460-3
Cet article contient des liens d’affiliation. Grâce à un partenariat avec la coopérative des Librairies indépendantes du Québec, 4% de votre achat (la totalité de mes redevances) sont remis à un organisme œuvrant en alphabétisation. Tous les achats comptent. Il suffit d’utiliser un de mes liens sécurisés. Cliquez ici pour obtenir plus d’informations.
J’ai réalisé hier que je n’avais pas répondu à ce message, peut-être parce que j’étais (trop?) touchée par le sujet de ta série numérique. Même si ce n’est pas jojo, il faut en parler. Les gens qui vivent des situations similaires méritent de se retrouver dans la littérature. Merci de leur donner une voix!
Merci à toi, Julie ! 🙂