Couverture du roman Je ne suis pas de ceux qui ont un grand génie de Sévryna Lupien, chez Stanké.
Il s’appelle Victor, mais préfère qu’on l’appelle Auguste. On ne sait pas précisément son âge. Il n’est pas de ceux qui ont un grand génie, mais il est de ceux qui ont une grande imagination. Un jour, il décide de quitter l’orphelinat Sainte-Marie-des-Cieux sans permission avec ses maigres possessions dans une taie d’oreiller.
Auguste sait lire et écrire. Ce livre, c’est le récit de ses aventures et de ses réflexions. Certaines de ses réflexions font sourire, ce qui adoucit le récit qui n’est pas joyeux dans son fond.

« J’avais appris en lisant Shakespeare qu’on ne sait pas si on doit être ou pas. Au début, je trouvais complètement absurde l’idée de se questionner sur une chose si évidente, mais aujourd’hui je comprends mieux. On a le choix d’être ou pas. Je ne crois pas que Shakespeare ait trouvé les mots les plus profonds pour le dire, mais moi, en dépit de mon absence de génie, je crois avoir compris ce vieil homme plus ou moins lucide qui manquait probablement de vocabulaire ou d’éducation. »

Aussi, il est de ceux qui ont un grand cœur. Il n’hésite jamais à partager un croissant avec un ami. D’ailleurs, l’amitié est au cœur de ses aventures. C’est grâce à ses amis qu’il peut survivre dans la rue. Et c’est grâce à ses amis qu’il peut faire de l’argent pour payer des croissants (les croissants sont une priorité). C’est rafraîchissant de lire une histoire où les adultes n’abusent pas de la naïveté d’un enfant en fugue.

« J’ai appris un jour que nous avions tous un arbre généalogique. Ça veut dire que toute notre parenté se retrouve dans les branches de l’arbre. C’est étrange, je pensais qu’il fallait dire qu’on avait des racines, pas des branches. Enfin, ça n’enlève rien au principe de la généalogie. J’étais simplement déçu parce que, si ça avait été des racines, personne n’aurait vu que je n’en avais pas. »

Il n’aime pas les métaphores que les adultes utilisent. Souvent, il ne les comprend pas. Et elles sont source d’angoisse.

« Madame Émilie a annoncé que monsieur Andy était malade et qu’il était cloué au lit. J’ai tout de suite craché mon thé sur la table quand il a dit ça. Il ne méritait pas ça, monsieur Andy, parce que ça fait vraiment mal, un clou. »

Pour lui, la vie n’est pas compliquée. Il voit le beau partout, même dans le moins beau.
Sa naïveté l’amène à croire que les camps de concentration étaient des camps où les enfants devaient se concentrer toute la journée et il pense que l’étoile jaune est une étoile de shérif et il décide d’en porter une lui aussi en hommage à un ami, entre autres.

« Harlem, c’est une grande ville de gens colorés comme Mathilde. Tous ces gens étaient vraiment chanceux d’avoir leur ville à eux. Ils avaient même leurs propres autobus de gens colorés. Ça devait être des gens estimés pour bénéficier de tous ces avantages humains, que je me suis dit. »

Sa grande imagination et sa vision de la vie contribuent-t-elles à le rendre plus heureux dans la réalité? Au fait, qu’est-ce que la réalité? Est-ce que les apparences sont trompeuses?
Il est fort possible que vous ayez envie de relire ce livre après l’avoir terminé.
Ou encore, que la fin vous perturbe un peu.
Et il est fort possible que vous ayez envie de prendre une pause dans votre lecture pour aller acheter un croissant.
Je n’en dis pas plus.

Je ne suis pas de ceux qui ont un grand génie
Sévryna Lupien
Éditions Stanké
ISBN-13 : 978-2-7604-1190-6

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